ORANGER, (Hist. nat. Bot.) (Page 11:554)

ORANGER, aurantium, s. m. (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond. Le pistil sort du calice, il est entouré de petites feuilles terminées par des étamines, & il devient dans la suite un fruit presque rond, & couvert d'une écorce charnue. Ce fruit se divise en plusieurs loges remplies d'une substance vésiculaire & charnue, & qui renferme des semences calleuses. Ajoutez aux caracteres de ce genre, que les feuilles ont à leur origine la forme d'un coeur. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Oranger, (Jardinage.) [Auteur: Daubenton, Pierre] (Page 11:554)

Oranger, (Jardinage.) arbre toujours verd, qui vient naturellement dans les climats les plus chauds de l'Asie & de l'Europe, même dans l'Amérique méridionale. Mais cet arbre, outre l'utilité de son fruit, a tant d'agrément & de beauté, qu'on le cultive encore bien avant dans les pays septentrionaux, où malgré qu'il soit trop délicat pour y passer les hivers en pleine terre, on a trouvé moyen de lui suppléer une température convenable, à force de soins & d'abris. C'est ce qui a donné lieu à la construction des orangeries qui sont à - présent inséparables des maisons de campagne où regne l'aisance.

L'oranger dans les pays chauds, devient un grand arbre & s'éleve souvent à 60 piés sur 6 ou 8 de circonférence. Mais comme dans la plus grande partie du royaume on ne le voit que sous la forme d'un arbrisseau, parce qu'on est obligé de le tenir en caisse, je ne traiterai ici de cet arbre que relativement à son état de contrainte. Quand l'oranger a été bien conduit de jeunesse, il fait une tige droite d'une belle hauteur, & une tête aussi réguliere que bien fournie de rameaux. Sa feuille est grande, longue & pointue, ferme, lisse & unie, d'un verd tendre, jaunâtre & très - brillant: cette teuille est singulierement caractérisée par un petit appendice antérieur en maniere de coeur, qui sert à distinguer cet arbre du citronier & du limonier, dont les feuilles sont simples. L'oranger donne pendant tout l'été une grande quantité de fleurs blanches d'une odeur délicieuse, qui parfume l'air & se répand au loin. Elles sont remplacées par un fruit rond, charnu, succulent,

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dont la couleur, le goût & l'odeur sont admirables. On ne peut en effet, refuser son admiration à un arbre qui conserve pendant toutes les saisons, une verdure des plus brillantes; qui réunit les agrémens divers d'être en même tems chargé de fleurs & de fruits, dont les uns sont naissans & les autres en maturité; & dont toutes les parties, telles que le je une bois, la feuille, la fleur & le fruit, ont une odeur suave & aromatique des plus agréables. L'oranger a encore le mérite d'être de très - longue durée; & quoiqu'il soit souvent renfermé, & toujours retenu dans d'étroites limites, on a vu de ces arbres subsister en caisse pendant deux siecles & au - delà.

L'oranger est plus aisé à multiplier, à élever & à cultiver qu'on ne se l'imagine communément. Tous les Jardiniers y mettent beaucoup de mystere, supposent qu'il y faut un grand art, & prétendent que cet arbre exige une infinité de préparations, de soins & de précautions. Cependant voici à quoi se réduit cet art si mystérieux de la culture des orangers. 1°. Leur faire une bonne préparation de terre, qui est fort simple; 2°. leur donner des caisses proportionnées à leur grosseur; 3°. leur former une tête réguliere; 4°. les placer dans la belle saison à une exposition favorable; 5°. les mettre pendant l'hiver dans une orangerie suffisamment aërée, mais où la gelée ne puisse pénétrer; 6°. les arroser avec ménagement; 7°. les r'encaisser au besoin; 8°. les rétablir des maladies ou accidens qui leur surviennent; 9°. enfin les garantir des insectes qui leur sont nuisibles. Avant d'entrer dans le détail de ces différens articles, il faut indiquer les moyens de se procurer des plants d'oranger. On y parvient de deux façons, ou en semant des pepins que l'on greffe ensuite, ou en achetant des plants greffés, que les marchands génois viennent vendre tous les ans, dans la plupart des grandes villes du royaume.

Pour élever de graine & greffer les orangers, je vais donner la pratique que conseille M. Miller, auteur anglois, très - versé dans la culture des plantes. Comme ses ouvrages n'ont point encore été traduits en notre langue, il sera avantageux de faire connoître sa méthode de cultiver les orangers. On pourra même s'en relâcher à quelques égards sans inconvénient, en raison de la différence du climat qui est un peu plus favorable dans ce royaume qu'en Angleterre.

Pour se procurer des sujets propres à greffer les différentes especes d'orangers, il faut, dit M. Miller, semer les pepins que l'on tire des citrons qui se trouvent pourris au printems. Les plants qui en viennent valent mieux que ceux des oranges, ni des limons pour servir de sujet; parce que le citronier croît le plus promptement, & qu'il est propre à greffer toutes les différentes especes de ces arbres. Il faut donc semer au printems des pepins de citron dans des pots remplis de bonne terre, que l'on plongera dans une couche de fumier a l'ordinaire, ou de tannée qui sera encore plus convenable. On les arrosera souvent, on les couvrira de cloches un peu relevées pour laisser passer l'air, & on les garantira de la grande chaleur du jour avec des paillassons. Les graines leveront au bout de 3 semaines; & si le semis à été bien conduit, les jeunes plants seront en état d'être transplantés un mois après dans des petits pots d'environ 5 pouces de diametre.

La terre dont on se servira pour cette plantation, & pour tout ce qui concernera les orangers, sera composée de 2 tiers de terre de pré la moins légere, & cependant la moins dure, mais qui soit grasse & limonneuse, qu'il faudra faire enlever avec le gazon de 10 pouces d'épaisseur; on y ajoutera une troisieme partie de fumier de vache bien pourri; on mêlera le tout ensemble, même avec le gazon, pour le faire pourrir, & on laissera reposer ce mélange pendant un an avant de s'en servir. Mais on aura soin de remuer le tout une fois le mois pour completer le mélange, pour faire pourrir les racines, pour bien rompre les mottes & rendre cette terre bien meuble. Il faudra la cribler avant de s'en servir pour en ôter sur - tout les racines; il ne faut cependant pas que cette terre soit trop fine, car l'excès à cet égard est préjudiciable à la plupart des plantes, & particulierement aux orangers.

En tirant les jeunes plants du pot où ils ont été semés, il faudra conserver le plus qu'il se pourra la terre qui tiendra aux racines. On mettra ces petits pots sous un chassis, dans une couche qui aura été renouvellée; on les arrosera souvent & légérement; on leur fera de l'ombre dans la grande chaleur du jour; & en y donnant les soins convenables, les plants auront 2 piés de haut dans le mois de Juillet de la même année. Alors on les laissera se fortifier en élevant par degré les chassis de la couche. On profitera ensuite d'un tems favorable pour les ôter & les mettre à une exposition où la grande chaleur ne puisse pas les endommager. Vers la fin de Septembre, il faudra les mettre à l'orangerie, dans l'endroit le plus aëré, & les arroser souvent, mais modérement.

Au printems suivant, on les lavera pour ôter la poussiere & la moisissure; & on les mettra encore dans une couche d'une chaleur moderée, ce qui les hâtera considérablement. Mais au commencement de Juin on cessera de les délicater, afin qu'ils soient propres à être écussonnés au mois d'Août. Alors on choisira sur des arbres fertiles & vigoureux de l'espece qu'on voudra multiplier, des rameaux ronds & forts, dont les boutons se levent plus aisément que ceux des branches foibles, plates ou anguleuses; & on les écussonnera à l'ordinaire. Ces greffes étant faites on les mettra dans l'orangerie pour les défendre de l'humidité; on tournera les écussons à l'opposite du soleil; on leur donnera de l'air le plus qu'il sera possible, & on les arrosera légérement & souvent. On pourra s'assurer un mois après des écussons qui auront réussi; alors il faudra couper la ligature.

On ne sortira ces arbres de l'orangerie qu'au printems suivant, & après avoir coupé les sujets à 3 pouces au - dessus de l'écusson; on les plongera avec leur pot dans une couche d'écorce d'une chaleur temperée; on leur donnera de l'air & de l'eau à proportion de la chaleur: mais il faudra les garantir avec soin de l'ardeur du soleil. En les conduisant ainsi, les greffes qu'ils pousseront vigoureusement auront au mois de Juillet 3 piés d'élévation pour le moins. Il faudra commencer à les accoutumer dans ce tems à la fatigue, afin qu'ils puissent mieux passer l'hiver dans l'orangerie. Comme la hauteur qu'ils auront prise sera suffisante pour la tige, on pourra arrêter le montant, afin de lui faire pousser des branches latérales. Il ne faudra pas manquer de les tenir chaudement pendant l'hiver qui suivra cette premiere pousse; car la couche de tannée les rend délicats en forçant leur accroissement: mais on ne peut guere se dispenser de les avancer ainsi, afin de leur faire prendre une grande élévation en une seule seve; car quand ces arbres sont plusieurs années à former leurs tiges, elles sont rarement droites. On conduira ces arbres ensuite de la même façon que les orangers qui ont pris leur accroissement, & dont il sera parlé après avoir donné la maniere de cultiver ceux que l'on achete des marchands génois.

Le plus court moyen d'avoir de beaux orangers, c'est de les acheter de ces marchands; car ceux que l'on éleve de graine dans ce climat, ne deviennent pas à beaucoup près si gros en 18 ou 20 ans: & quoique les têtes de ceux qu'on apporte d'Italie

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soient petites, on peut cependant en 3 ans leur faire prendre de belles têtes, & les amener à fruit en les conduisant avec soin. Dans le choix de ces arbres, il faut préférer ceux qui ont de beaux écussons; car ceux qui n'en ont qu'un forment rarement une tête réguliere. Il faut d'ailleurs que les tiges soient droites, les branches fraîches, l'écorce pleine & vive. On doit les mettre dans l'eau environ jusqu'à mi - tige; les y laisser 2 ou 3 jours selon qu'on les verra se gonfler; ensuite nettoyer leurs racines de la moisissure; retrancher celles qui sont séches, rompues ou meurtries; rafraîchir celles qui sont saines; ôter tout le chevelu qui se trouve toujours desséché par la longueur du trajet; frotter les tiges avec une brosse de crin, puis avec un morceau de drap plus doux; & enfin couper les branches à environ 6 pouces de la tige. On se servira pour planter ces arbres d'une bonne terre neuve, mêlée avec du fumier de vache bien pourri; mais il ne faut pas les mettre dans de grands pots, il suffit pour cette premiere transplantation de les prendre de grandeur à pouvoir contenir les racines. On n'oubliera pas de mettre dans le fond des tuilots ou pierres plates, pour donner passage à l'eau. Ensuite on plongera les pots dans une couche tannée d'une chaleur modérée; on les arrosera largement pour affermir la terre autour des racines; on répétera les arrosemens aussi souvent que la saison l'exigera, & on aura soin de faire de l'ombre sur les chassis de la couche pour la garantir de la trop grande ardeur du soleil.

Si les arbres poussent aussi bien qu'on doit s'y attendre avec les soins que l'on vient d'indiquer, ils auront au commencement de Juin des rejettons vigoureux. Il faudra les arrêter alors pour faire garnir les têtes; on leur donnera aussi beaucoup d'air, & on commencera à ne les plus délicater à la mi - Juillet, en les mettant cependant à une exposition chaude, mais à l'abri du grand soleil & des vents; on ne les y laissera que jusqu'à la fin de Septembre: il faudra les mettre alors dans l'orangerie près des fenêtres que l'on tiendra ouvertes toutes les fois que la saison le permettra. Mais à la fin d'Octobre il faudra leur donner la place la plus chaude de l'orangerie; les arroser souvent & bien légérement pendant l'hiver, & surtout avoir grand soin de les garantir de la gelée.

Lorsqu'au printems suivant on sortira de l'orangerie les arbrisseaux les moins délicats, comme les grenadiers, &c. on fera bien de laver & de nettoyer les feuilles & les tiges des orangers; d'enlever la terre du dessus les pots pour en substituer de la nouvelle; de la couvrir d'une couche de fumier de vache bien pourri, & d'avoir grande attention que ce fumier ne touche pas la tige de l'arbre. Comme l'orangerie se trouve alors moins embarrassée, il sera très - à - propos d'éloigner les orangers les uns des autres, afin de faciliter la circulation de l'air qu'on laissera entrer plus ou moins selon la température de la saison. Mais il ne faudra les sortir que vers le milieu du mois de Mai, qu'on peut regarder comme le tems où la belle saison est assurée. Il arrive souvent quand on se presse de sortir ces arbres, que les matinées froides leur font un grand mal. Il faut les placer pour passer l'été, à une situation également à l'abri des grands vents & de l'ardeur du soleil: ces deux inconvéniens sont très - contraires aux orangers. A mesure que ces arbres pousseront il faudra arrêter leurs rejettons vigoureux qui poussent irrégulierement, afin que les têtes se garnissent; mais notre auteur ne conseille pas de pincer le sommet de toutes les branches, comme quelques - uns le pratiquent, cela fait pousser une quantité de petits rejettons trop foibles pour porter du fruit. En s'attachant à donner de la régularité à la tête, il faut ménager les branches vigoureuses, & ne pas craindre de supprimer les menus rejettons qui nuisent ou qui croissent, ou qui se chiffonnent.

Les orangers veulent être arrosés souvent & largement dans les grandes sécheresses de l'été, surtout lorsque les arbres sont formés. Il faut que l'eau ait été exposée au soleil, qu'elle soit douce & sans aucun mélange d'égoût de fumier; cette pratique, malgré la recommandation de quelques gens, est pernicieuse à ces arbres, ainsi qu'à quantité d'autres. Il en est de ceci comme des liqueurs spiritueuses qui, lorsqu'on en boit, semblent donner de la vigueur pour le moment présent, mais qui ne manquent jamais d'affoiblir ensuite.

Les orangers veulent être déposés tous les ans. On préparera de la bonne terre pour cela, un an avant que de s'en servir, afin qu'elle soit bien mêlée & bien pourrie. La fin d'Avril est le tems le plus convenable pour cette opération, afin que les arbres puissent faire de nouvelles racines avant qu'on les sorte de la serre: il faudra même les y laisser quinze jours de plus qu'à l'ordinaire pour qu'ils aient le tems de se bien affermir.

Quand on dépote les orangers il faut y donner des soins, couper toutes les racines qui excedent la motte, rechercher celles qui sont moisies, puis avec un instrument de fer pointu, on tirera d'entre les racines toute la vieille terre qu'on en pourra ôter, sans les rompre ni endommager; puis mettre le pié des arbres dans l'eau pendant un quart d'heure, pour pénétrer d'humidité la partie inférieure de la motte. Ensuite on frottera la tige avec une brosse de crin; on nettoyera les têtes avec un morceau de drap & de l'eau. Puis les pots se trouvant préparés avec des pierres ou des tuilots au fond, on mettra dans chacun environ deux pouces de haut de nouvelle terre, sur laquelle on placera l'arbre bien dans le milieu du pot, que l'on achevera d'emplir avec de la bonne terre en la pressant fortement avec les mains: après quoi on arrosera l'arbre en forme de pluie par - dessus sa tête; ce qu'il faudra toujours pratiquer dans la serre la premiere fois après que l'on aura lavé & nettoyé les arbres, cela leur fera pousser de nouvelles racines & rafraîchir beaucoup leur tête. Quand on sortira les orangers nouvellement empotés, il sera très - à - propos de les mettre à l'abri d'une haie, & d'appuyer leurs tiges avec de bons bâtons, pour empêcher que le vent ne les dérange. Son impétuosité renverse quelquefois les arbres récemment plantés, ou ébranle tout au moins les nouvelles racines.

Pour rétablir les vieux orangers qui ont été mal gouvernés, & dont les têtes sont chenues, la meilleure méthode est d'en couper la plus grande partie au mois de Mars; de les arracher des caisses; de secouer la terre qui tient aux racines; de retrancher toutes celles qui sont moisies, & de couper tout le chevelu; de nettoyer ensuite le reste des racines, ainsi que la tige & les branches: puis on les plantera dans des pots ou dans des caisses que l'on plongera dans une couche de tannée, en suivant ce qui a été dit pour les orangers venus de loin, & les gouverner de la même façon. Par ce moyen ils formeront de nouvelles têtes, & reprendront leur beauté en moins de deux ans. Si cependant les orangers qu'il est question de rétablir sont fort gros, & qu'ils aient été en caisse pendant plusieurs années, il vaut mieux les planter avec de la bonne terre dans des manequins qui soient plus petits que les caisses, & que l'on mettra dans la couche de tannée au commencement de Juillet; lorsqu'ils auront bien poussé, on mettra les arbres avec leur manequin dans des caisses dont on remplira le vuide avec de la terre convenable. On évitera par ce moyen de mettre les caisses dans la

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tannée, ce qui les pourriroit; d'ailleurs les arbres seront tout aussi bien de cette façon que s'ils avoient d'abord été plantés dans les caisses. Mais il ne faudra pas oublier de les faire rester pendant 15 jours ou 3 semaines dans l'orangerie avant de les mettre en plein air.

La taille des orangers n'est nullement difficile. Elle consiste à conserver les branches vigoureuses; à retrancher les rejettons qui se chiffonnent, se croisent & se nuisent; à supprimer tout le petit bois gresle & trop mince pour donner des fleurs & produire de bon fruit. Comme cet arbre est susceptible de différentes formes, & que sa verdure en fait le principal agrément, ou du moins le plus constant, on doit s'attacher à ce que sa tête soit uniformément garnie au moyen d'une taille assidue & bien ménagée; sans cependant y employer le ciseau du jardinier, qui en laissant une grande partie des feuilles coupées à - demi, montre une décharnure désagréable: la précision de la forme ne dédommage pas de cet inconvénient; d'ailleurs les feuilles qui ont été atteintes du ciseau se fannent & font un mauvais effet. Il vaut beaucoup mieux laisser pointer légérement toutes les branches, plus elles approcheront de l'ordre naturel, plus l'aspect en sera agréable.

S'il arrive que la grêle, le vent, la maladie, ou tel autre accident, viennent à endommager & défigurer un oranger, on rabattra l'arbre en coupant toutes ses branches jusqu'à l'endroit où il paroîtra de la vigueur & de la disposition à former un nouveau branchage, capable de donner une forme qui puisse se perfectionner. Dès qu'on s'apperçoit qu'un oranger est malade, ce qui s'annonce par la couleur jaune de ses feuilles, il faut chercher promptement à y remédier, soit en le mettant à l'ombre s'il a souffert de la trop grande chaleur, ou bien en visitant ses racines où se trouve ordinairement l'origine du mal: dans ce cas, on doit en retrancher les parties viciées & renouveller la terre. Mais les punaises sont le plus grand fléau de cet arbre; elles attaquent ses feuilles sur - tout en hiver. Dès qu'on s'en apperçoit, il faut y remédier en enlevant & en écrasant ces insectes avec les doigts, ou en frottant les branches avec une brosse & les feuilles avec un linge, après avoir trempé l'un & l'autre, soit dans du vinaigre, soit dans de l'eau empreinte d'amertume ou de sel.

L'agrément ne fait pas le seul mérite des orangers, on en retire aussi de l'utilité, ses fleurs servent à quantité d'usages; on en compose des eaux, des li queurs, des confitures, &c. tout le monde connoît l'excellente qualité de ses fruits; ceux du plus grand nombre d'especes d'orangers sont bons à manger. On tire aussi parti des oranges aigres. Voyez Orange.

Le bois de l'oranger, quoique de bonne qualité, est de bien peu de ressource même dans les pays très - chauds, où ces arbres deviennent très gros, parce que le tronc se trouve toujours pourri dans le coeur.

Il y a une infinité de variétés de cet arbre; on se contentera de rapporter ici celles que l'on cultive ordinairement.

1. L'orange aigre ou la bigarade.

2. Le même à feuilles panachées.

3. L'orange douce ou de Portugal.

4. L'oranger à feuilles coquillées ou le bouquetier; ainsi nommé à cause de la quantité de fleurs qu'il donne.

5. Le même oranger à fleurs panachées.

6. L'orange cornue.

7. L'oranger hermaphrodite, dont le fruit participe de l'orange & du citron.

8. L'oranger de Turquie, dont la feuille étroite approche de celle du saule.

9. Le même à feuilles panachées.

10. Le pampelmousse: ce fruit est de la grosseur d'une tête humaine.

11. L'oranger femelle: ainsi nommé à cause de sa fécondité.

12. L'oranger tortu, a mérité ce nom à cause de sa difformité.

13. La grosse orange, dont la peau a des inégalités.

14. L'orange étoilée; ainsi nommée à cause des 5 sillons dont elle est marquée à la tête, & qui représentent une étoile.

15. L'orange à écorce douce.

16. L'oranger à fleur double.

17. L'oranger de la Chine.

18. Le petit oranger de la Chine.

19. L'oranger nain, à fruit aigre: il est différent de celui de la Chine.

20. Le même dont les fruits & les feuilles sont panachés.

Ces orangers nains sont d'un agrément infini; leurs feuilles sont très petites, & garnissent bien les branches: ils donnent une quantité de fleurs qui couvrent l'arbre, & forment naturellement au bout de chaque branche, un bouquet d'une odeur délicieuse. Mais il faut des soins & des précautions pour entretenir ces arbres en vigueur: les serrer plutôt, les sortir plus tard, & les tenir plus chaudement que les orangers ordinaires. Il en est de même du pampelmousse, de l'oranger de la Chine & de ceux à feuilles panachées. M. d'Aubenton le subdélégué.

Oranger, (Chimie, Pharmacie, Diete & Mat. méd.) [Original Class: Chimie , Diète , Pharmacie , Matière médicale] [Auteur: Venel] {Machine Class: Chimie} (Page 11:557)

Oranger, (Chimie, Pharmacie, Diete & Mat. méd.) Il y a deux especes d'oranger dont les hommes tirent des remedes & des alimens: savoir l'oranger à fruit doux, & l'oranger à fruit aigre.

Les feuilles, les fleurs & les fruits de l'un & de l'autre, sont les parties de ces arbres qui sont en usage.

Les feuilles, les fleurs & l'écorce des fruits sont chargées d'une huile essentielle abondante qui est très pénetrante & très - aromatique; cette huile est contenue dans des cellules assez considérables pour paroître distinctement à la simple vûe, celles de l'écorce du fruit sont même si amples & si pleines, qu'il n'y a qu'à la plier, la froisser ou la racler avec un corps raboteux, pour en faire couler cette huile abondamment. C'est ce principe qui donne cette flamme vive & claire qui traverse rapidement celle d'une bougie lorsqu'on presse entre les doigts un zest d'orange auprès de cette flamme: c'est ce même principe qui pique si vivement la langue & le palais, & qui met la bouche en feu lorsqu'on mâche l'écorce jaune d'une orange fraîche; c'est encore cette huile qui irrite si douloureusement les yeux lorsqu'on en approche de très - près une orange que l'on pele.

Nous avons exposé à l'article Huile le procédé par lequel les Italiens ramassoient celle - ci aussi inaltérée qu'il est possible.

L'huile des fleurs d'orange, que les Italiens appellent neroli, n'en peut être séparée que par la distillation à l'eau, qui est le second procédé que nous avons décrit à l'article Eaux ditillées, voyez cet article; car la distillation des fleurs d'orange par le bain - marie que l'on emploie communément pour en retirer un autre produit beaucoup plus usuel, savoir l'eau essentielle dont nous allons parler dans un instant, ne fournit point d'huile essentielle. Voyez Huile essentielle au mot Huile, & ce qui est dit du bain - marie à l'article Feu, Chimie.

Cet autre principe dont nous avons à parler, savoir le principe aromatique qui s'éleve avec le principe aqueux surabondant ou libre (Voyez Eau distillée) dans la distillation des fleurs d'orange au bain marie, constitue la liqueur très - connue sous le nom d'eau de fleurs d'orange. Voyez à l'article Eau distillée, la maniere de la préparer, & son essence

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chimique, aussi bien que ses propriétés médicinales communes, au mot Odorant, principe.

Cette eau est très - communément appellée dans les ouvrages de Médecine latins, aqua naphae.

On peut retirer une eau essentielle très - analogue à celle - ci, des feuilles d'oranger & des écorces du fruit.

Tout ce que nous avons dit jusqu'à présent convient également, non - seulement aux feuilles, aux fleurs & aux fruits de l'un & de l'autre oranger, mais encore, avec de très - légeres différences, aux parties analogues du citronier, du cédrat, du bergamotier, &c.

C'est encore indifféremment les fleurs de l'un ou de l'autre oranger qu'on prend pour en préparer des conserves solides & liquides ou molles, & des teintures ou ratafiats. Les confitures préparées avec l'écorce blanche de l'un & de l'autre fruit convenablement épuisée de leur extrait amer par des macérations ou des décoctions suffisantes, ont à - peu - près les mêmes qualités diététiques & médicamenteuses.

La chair, moëlle ou pulpe de l'orange douce, contient un suc abondant, doux & aigrelet, qui rend ce fruit très - rafraîchissant & calmant la soif. On mange cette chair dépouillée de son écorce, ou seule, ou avec du sucre; cet aliment opere manifestement sur l'estomac dans la plûpart des sujets, cette sensation qui est désignée dans la plûpart des livres de diete par l'expression de réjouir l'estomac, c'est - à - dire qu'il est assez généralement aussi salutaire qu'agréable. Cependant comme le parenchyme ou l'assemblage de cellules membraneuses où ce suc est enfermé, est coriace & indigeste; il vaut mieux sucer l'orange dans laquelle on a fait ce qu'on appelle un puits, c'est à - dire qu'on a ouverte par un des bouts, & dont on a écrasé la chair encore enfermée dans le reste de l'écorce, en y plongeant à plusieurs reprises une fourchette ou un couteau à lame d'argent, y dissolvant ensuite, si l'on veut, une bonne quantité de sucre en poudre; & il vaut mieux, dis - je, avaler le suc d'orange ainsi préparé, que de manger l'orange entiere. On peut rendre encore cette préparation plus gracieuse, si l'on mêle parmi le sucre qu'on y emploie une petite quantité d'eleosaccharum préparé sur - le - champ, en frottant un petit morceau de sucre contre l'écorce de la même orange; c'est le moyen d'unir le parfum de l'écorce à la saveur du suc. On peut préparer aussi avec le même suc une liqueur parfaitement analogue à la limonade, & qui a à - peu - près les mêmes vertus, quoiqu'à un degré inférieur, parce que l'acide de l'orange douce est beaucoup plus tempéré que celui du citron. La premiere liqueur est connue sous le nom d'orangeade. Voyez Citronnier & Limonade.

Le suc de l'orange douce se conserve moins bien que celui du citron; aussi ne le garde - t - on que fort rarement dans les boutiques; il ne seroit pas même fort agréable, & il auroit assez peu de vertu si on le conservoir sous la forme de sirop.

L'orange amere n'est employée parmi nos alimens qu'à titre d'assaisonnement: on arrose de son suc la plûpart des volailles & des gibiers qu'on mange rôtis; & il est sûr que cet assaisonnement en facilite la digestion. On fait entrer aussi leur rapure & même leur écorce entiere seche, dans quelques ragoûts assez communs; l'amertume qu'ils y portent peut être regardée aussi comme un assaisonnement utile. Il est bon sur - tout pour corriger la fadeur, l'inertie des poissons gras mangés en ragoûts, comme de l'anguille, &c. On fait aussi dans quelques provinces, en Languedoc, par exemple, avec l'orange amere non pelée & coupée par tranches, l'ail, la rapure de pain, & le jus de viande qu'on fait bouillir ensemble, une fausse qu'on sert avec les volailles rôties; cette fausse ne peut qu'être & est en effet détestable, car les sucs acides végétaux sont entierement dénaturés par l'ébullition, & acquierent une saveur très - desagréable, que l'ail & l'extrait amer de l'écorce blanche & des pépins ne corrigent certainement point.

Les pépins d'orange, & sur - tout ceux de l'orange aigre, sont vermifuges comme toutes les substances végétales ameres.

L'écorce d'orange amere est comptée parmi les sébrifuges les plus éprouvés: on la donne, soit en décoction, soit dessechée & réduite en poudre; elle est regardée aussi comme un bon emmenagogue, & comme un spécifique dans la rétention & dans l'ardeur d'urine; la dose en substance en est depuis demi-gros jusqu'à deux gros.

Les écorces d'orange, soit douce, soit amere, confites, peuvent être regardées, par leur legere amertume & par un reste de parfum qu'elles retiennent, comme stomachiques, fortifiantes, propres à aider la digestion lorsqu'on les mange à la fin des repas dans l'etat de sante, & à reveiller doucement le jeu de l'estomac dans les convalescences. La conserve ou le gâteau de fleurs d'orange, dont il est bon de rejetter les fleurs après qu'on les a mâchées & que le sucre est fondu dans la bouche; & la marmelade ou conserve liquide, possedent les mêmes qualités, & même à un degré supérieur. Le ratafiat de fleurs d'orange qui est prepare avec une teinture des fleurs, joint à l'efficacité de leur amertume & de leur parfum, celle de l'esprit ardent. Voyez Liqueurs spiritueuses, Diete.

L'eau de fleurs d'orange qui est amere & chargée d'une matiere aromatique très - concentrée, est non seulement employée pour aromatiser des alimens, des boissons & des remedes, mais même seule ou bien faisant la base d'un remede composé; on la mêle très - utilement au premier égard, c'est - à - dire comme assaisonnement au lait & à plusieurs de ses préparations, telles que la crême douce, le fromage frais à la crême, le caillé, les crêmes avec les oeufs, &c. L'eau de fleurs d'orange pure ou seule est à la dose d'une ou de deux cuillerées, une remede puissamment stomachique, cordial, vermifuge; carminatif, emmenagogue, histérique; elle remédie surtout très - efficacement, prise le matin à jeun, aux foiblesses & aux douleurs d'estomac; elle entre très communément dans les juleps & dans les potions cordiales & histériques, à la dose de deux jusqu'à quatre & même six onces. On prépare avec l'eau de fleurs d'orange & avec les écorces des fruits, des sirops simples qui ont à - peu - près les mêmes vertus que ces matieres.

Les fleurs & les écorces des fruits, aussi - bien que les divers principes & préparations simples qu'on en retire, & dont nous venons de parler, tels que l'eau distillée, l'huile essentielle, la teinture, &c. entrent dans un très - grand nombre de compositions pharmaceutiques officinales.

On trouve dans la plûpart des pharmacopées la description d'une pommade de fleurs d'orange qui se prépare en aromatisant du sain - doux avec les fleurs d'orange qu'on fait infuser dans ce sain - doux liquéfié par la chaleur du bain - marie, en réitérant plusieurs fois ces infusions sur des nouvelles fleurs, &c. Voyez Pommade & Onguent. Cette pommade, outre les qualités médicinales du sain - doux, paroît posséder encore la qualité résolutive, tonique, fortifiante, propre aux huiles essentielles. Le sain - doux liquide & chaud se charge d'une certaine quantité de l'huile essentielle des fleurs d'orange, & sur - tout lorsqu'on les écrase dans le sain - doux. (b)

Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, par une Société de Gens de lettres (1751-1772)
Publié sous la direction de Diderot et d'Alembert
Scanné et mis au format électronique par l'Université de Chicago

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