Saule pleureur

Il perd ses plumes, perd ses larmes.

Comme un cœur se vide de larmes,
L'arrosoir a perdu ses plumes.

Éventail au soleil fané,
Loterie des mois des années,
Dans l'allée le sable s'enroue,
Où mon chagrin fera la roue.

Jardin faut-il que tu t'en ailles,
Et l'été de cet éventail,
Secondé par mon petit doigt,
Qui chatouille un bouton de rose,
Effronté sans pourtant qu'il ose,
Trop presser son éclosion.

Après s'être bien amusée,
La rose rentre en son cocon,
La rose revêt sa chemise,
Et tout est à recommencer.

Et les outils dans la remise,
Ensemble-jardin se lamentent,
L'arrosoir voudrait sur l'amante,
Verser des larmes mais la bêche,
N'a pas retrouvé cette espiègle,
Qui se cache sous l'herbe sèche.

Raymond Radiguet (1903-1923)
Recueil : Poèmes divers